Récupérer sa part d’héritage : la procédure à suivre
UNE PROCURATION À L’UN DES HÉRITIERS POUR FACILITER LES PROCÉDURES. UN TESTAMENT EST NUL S’IL PORTE SUR PLUS DU TIERS DU LEGS. LE TRIBUNAL PEUT ORDONNER LA VENTE D’UN BIEN SI LES 2/3 DES INDIVISAIRES SONT D’ACCORD.
La liquidation d’un héritage est souvent une épreuve très délicate dans une famille. Une fois la pilule de la perte avalée, les héritiers sont vite rattrapés par le circuit infernal des procédures de succession. Ils devront, tout d’abord, requérir un certificat de décès auprès des autorités locales, précisément auprès de l’officier de l’état civil, et ce dans un délai légal de 30 jours, sous peine de payer une amende qui peut aller jusqu’a 1200 DH.
Sur la base du certificat de décès, de l’état civil, d’une photocopie de la carte d’identité nationale de chaque héritier et du témoignage de douze personnes de sexe masculin (proches, amis de la famille ou voisins) qui devront confirmer les informations, le adoul devra dresser par la suite l’acte d’hérédité, la pierre angulaire de ce parcours du combattant, indispensable pour toute personne désirant faire valoir ses droits d’héritier. En outre, s’ils héritent d’un bien immeuble, les ayants droit devront également présenter au adoul le titre foncier du bien en question. Naturellement, le titre foncier est à récupérer auprès de la conservation foncière.
L’acte d’hérédité, fournit en deux copies, comportera le nom du défunt, ceux des héritiers légaux avec leur quote-part respective. Et sera signé par les douze témoins, avant d’être authentifié par le tribunal.
Une fois l’acte d’héritage rédigé, la succession peut se déclencher. Par succession, comme définie dans l’article 321 du Code de la famille, on entend tout ce que le défunt possédait de son vivant : de biens comme l’argent, les biens immeubles et meubles ainsi que des droits patrimoniaux tels que le droit de préemption et le droit d’acceptation du testament.
Il convient de noter que pour éviter un déplacement de tous les héritiers, ces derniers peuvent se faire représenter par l’un d’entre eux pour toutes les formalités. Pour ce faire, ils devront signer une procuration authentique, avec la définition exacte de toutes les formalités pour lesquelles le mandant est dépêché.
Quoi qu’il en soit pour jouir des biens meubles du défunt (voitures, or, etc.), les héritiers désignent généralement un représentant à qui ils font une procuration où figurent, entre autres, les noms du défunt et des ayants droit. Le représentant s’occupera par la suite de la liquidation du bien en question avant de procéder à la répartition selon les quotes-parts des héritiers.
Partage des avoirs en numéraire
Pour prétendre aux avoirs en numéraire du proche décédé détenus en compte(s) bancaire(s), les ayants droit ou leur représentant doivent se présenter à la banque. Une fois que l’acte d’hérédité et le certificat de décès lui sont présentés, le banquier envoie le dossier à son service juridique pour étude. Celle-ci entamera dans la foulée la procédure de liquidation du compte et de répartition des fonds entre héritiers (sur la base des quotes-parts mentionnées dans l’acte d’héritage).
Cette procédure de liquidation peut tout aussi bien durer quelques semaines que plusieurs mois, suivant la situation du défunt. Si, par exemple, ce dernier disposait d’un crédit au moment de sa mort, c’est une autre paire de manches qui attend les héritiers: ils devront ainsi activer l’assurance décès invalidité liée au crédit en faisant une demande auprès de la compagnie d’assurance pour le remboursement du capital restant dû à la banque. Celle-ci bloque tous les comptes du défunt en attendant que le crédit soit totalement remboursé, elle procédera par la suite à la répartition de l’argent hérité.
Partage des biens immeubles
Si le défunt détient un à un plusieurs biens immobiliers, les ayants droit devront se présenter à la conservation foncière pour déposer l’acte d’hérédité et le certificat de décès. Cette dernière grèvera par la suite les noms des héritiers sur le(s) titre(s) foncier(s).
Il va sans dire que la procédure est bien plus fastidieuse quand il s’agit de partage des biens immeubles. Nombreuses sont les successions qui sont bloquées lorsqu’il y a des conflits d’intérêts entre les héritiers. Après le décès, les biens du défunt appartiennent en commun à ses héritiers, sans que les parts respectives de chacun ne soient matériellement individualisées ; c’est ce qu’on appelle l’indivision. Celle-ci prend fin lorsqu’il est procédé au partage des biens, lequel peut parfois être effectué des années plus tard.
Dans la pratique, la vente d’un bien en indivision nécessite l’unanimité des indivisaires (qui ont acquis ou reçu des droits de propriété sur ce bien). Un héritier pourrait donc, à lui seul, empêcher la vente, en s’abstenant de signer l’acte de vente.
Ceci dit, si au moins 2/3 des indivisaires sont d’accord pour mettre en vente un bien, le tribunal de grande instance peut autoriser cette vente, sauf si le bien en vente fait l’objet d’un démembrement ou que l’un des indivisaires est absent ou qu’il n’est pas en mesure d’exprimer sa volonté.
L’indivision est un état instable, et le partage peut toujours être provoqué, comme le précise l’article 978 du D.O.C: «Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision, et chacun des communistes peut toujours provoquer le partage. Toute clause contraire est sans effet».
Par ailleurs, si le défunt a acheté le bien à travers un financement bancaire qui court toujours au lendemain de sa mort, les héritiers devront activer l’assurance décès-invalidité, en faisant appel à la compagnie d’assurance en question afin qu’elle rembourse le capital restant dû. Le bien étant dans ce cas hypothéqué, l’obtention de la mainlevée du créancier est primordiale. Selon l’article 157 du Dahir du 2 juin 1915, «l’hypothèque est un droit réel sur les immeubles affectés à l’acquittement d’une obligation ; elle est de sa nature indivisible et subsiste en entier sur les immeubles affectés, sur chacun et sur chaque portion de ces immeubles affectés ; elle les suit dans quelques mains qu’ils passent». Ainsi, le cohéritier du débiteur décédé qui a reçu son lot d’immeuble hypothéqué devient débiteur hypothécaire pour le tout.
Notez enfin que dans la plupart des législations, chaque individu est libre de répartir ses biens par testament entre ses héritiers ou autres personnes étrangères à sa succession. La grande particularité du droit musulman, et partant du droit marocain, réside dans la restriction à cette liberté. Une personne de son vivant ne peut léguer par testament que le tiers de son patrimoine, déduction faite des dettes. Si elle veut disposer de plus d’un tiers, les héritiers majeurs doivent donner leur consentement sous peine de nullité. D’ailleurs, le consentement ne peut être déclaré qu’après l’ouverture de la succession. De même, le legs en faveur d’un héritier n’est admissible que si les autres héritiers donnent leur consentement.
Les héritiers devront se présenter à la compagnie d’assurance avec le certificat de décès du défunt. Contrairement aux autres formes d’héritage, le capital décès n’entrant pas dans la succession, les bénéficiaires désignés dans le contrat par le défunt seront les seuls destinataires de la prestation. De plus, les créanciers du défunt n’ont aucun recours contre les bénéficiaires du capital de l’assurance-vie, même s’il s’agit d’héritiers, car le bénéficiaire ne tire pas son droit de l’actif successoral ni du patrimoine du défunt, mais de celui du promettant, c’est-à-dire l’assureur.
Parmi les legs du défunt, on distingue aussi les pensions de retraite. Pour l’allocation CNSS, par exemple, si l’affilié décède après l’âge légal de la retraite ou avant d’atteindre cet âge mais en remplissant la condition des 3 240 jours de cotisation avant son décès, les ayants droit bénéficieront d’une pension de survivants. Ces derniers sont le conjoint ou l’épouse, ses enfants à charge âgés de moins de 16 ans, ses enfants en apprentissage jusqu’à l’âge de 18 ans et ses enfants scolarisés jusqu’à l’âge de 21 ans. La veuve du défunt devra alors remplir un formulaire de «Demande de remboursement des pensions de survivants», produire un extrait d’acte de décès de l’assuré, une copie certifiée conforme à l’original de l’acte de mariage, un certificat médical précisant la cause du décès pour l’assuré ou attestation de décès délivrée par les autorités locales, et un procès-verbal de la Police ou de la Gendarmerie royale et formulaire de subrogation de droit, si le décès est intervenu suite à un accident de la voie publique.
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